Cette image d’un tuyau contenant des détritus désagréables à observer a été publiée le 1er septembre 2023 à 19h 02 (puis modifiée à 20h 06) sur la page Facebook dénommée Radio Guinée qui avait plus de 560 000 followers lors à cette date, avec la description suivante : « Guinée : un des tuyaux qui conduisent l’eau dans nos ménages. Que Dieu nous protège, car la SEG se joue de nous… Merci à Méschacson kourouma (journaliste Espace Guinée) pour cette image ».
Verdict : fausse information
Ce tuyau ne fait pas partie du réseau de distribution d’eau de la SEG (Société des eaux de Guinée). Elle n’a même pas été prise en Guinée.
Prologue
Cette photo a été publiée dans un contexte où la qualité du service de la SEG est régulièrement très critiquée par les Guinéens, particulièrement ceux de la capitale. En effet, plusieurs quartiers de Conakry ainsi que la quasi-totalité des villes de l’intérieur du pays sont sans eau au robinet. Et, les quelques rares ménages qui sont desservis par l’entreprise publique s’interrogent, à tort ou à raison, sur la qualité de l’eau qui coule dans leurs robinets. Certains s’abstiennent carrément de boire l’eau du robinet, parce qu’ils la jugent non potable. Mais, la photo de ce tuyau qui suscite réprobations et indignations ne montre pas un conduit d’eau de la SEG. Elle n’a d’ailleurs même pas été prise en Guinée.
Une recherche inversée d’image a permis de remonter les origines de cette image. Avant ‘’Radio Guinée’’, d’autres internautes avaient déjà publié cette image en l’attribuant à différents pays (comme le Cameroun, le Togo, le Gabon ou encore le Bénin). Colombe de la Paix – Togo l’a postée en mars 2023, tout comme Environnement TV Guinée l’a publiée en juin 2020 (soit trois ans avant Radio Guinée) en l’attribuant au Congo-Brazzaville.
Mais, cette photo est encore plus vieille qu’elle le paraisse. Nos recherches ont permis de retrouver des articles de presse parlant de cette image. Dans un article publié le 9 mars 2023 avec le titre « une canalisation d’eau potable au Cameroun ou au Bénin », l’Agence France Presse (AFP) rapporte que « cette image provient en réalité de la Thaïlande et date d’avant 2016 ». Elle a été publiée dans un article par Thai PBS (un site thaïlandais). Ces informations de l’AFP sont confirmées par un article écrit par ‘’Les Observateurs’’ de France 24 et publié le 3 avril 2023. On retrouve également la même photo publiée le 6 avril 2016 sur la page Facebook de Chavalit Pao Satthamsakul, un internaute thaïlandais.
Nous avons tenté de joindre les protagonistes dans cette photo
Jusqu’au moment de la publication de cet article, toutes nos tentatives pour entrer en contact avec l’administrateur de la page Radio Guinée et le journaliste Méschacson Kourouma (qui revendique cette image dans un commentaire sur ladite page) sont restées vaines. Nous leur avons pourtant écrit à tous les deux depuis le 2 septembre dernier pour demander comment ils ont obtenu cette image. Mais, à date, nous n’avons eu aucune réponse de leur part, alors que cette photo suscite encore des partages et des commentaires sur la page Radio Guinée. De nombreux internautes qui l’ont vue ont exprimé une indignation, même si quelques-uns ont tenté d’alerter sur le fait que cette image a été sortie de son contexte.
Joint au téléphone, la Société des eaux de Guinée, l’entreprise publique mise en cause dans cette publication de Radio Guinée, a démenti l’appartenance de ce tuyau à son réseau de distribution. « J’ai envoyé l’image au service travaux, il s’est révélé que nous n’avons pas des tuyaux comme ça dans notre réseau. Ce n’est donc pas une image d’un tuyau de la SEG », a indiqué Madame Diallo Mariama Dalanda Barry, la responsable de la communication de la SEG.
Conclusion
Désormais, il est établi que ce conduit contenant des détritus désagréables à regarder n’est pas un des tuyaux de la SEG qui conduisent l’eau dans ménages guinéens. L’information reprise dans la publication de Radio Guinée est donc fausse.
Cet article a été rédigé par Mamadou Bailo Keita dans le cadre du projet Implication des Médias Numériques dans la Prévention Active des Conflits et Tensions (IMPACT), sous la coordination de Thierno Ciré Diallo et validé par Abdoulaye Sadio Diallo.